Baptiste RABOURDIN

Menu

Étiquette : philosophie

Vegan, catastrophisme, Internet… blasé !

Je confesse passer trop de temps à lire à droite à gauche tout ce que la toile me fournit. C’est de la vraie procrastination. Sous couvert de coller à l’actualité ( « veille technologique »… vraiment ? ) j’absorbe chaque article ou interview qui me passe sous les yeux. Jusqu’à l’indigestion.

Les réseaux sociaux ne me proposent que des articles franchement déprimants. Tenez, pour exemple, ma revue de presse matinale façonnée par les algorithmes de facebook, mes flux rss et mes boites mails, m’ont appris que « le plancher océanique est tapissé de déchets plastiques« .

Le plus désespérant c’est aussi la réaction que cela suscite avec cette préconisation :

un réseau mondial de surveillance est nécessaire afin de partager les données sur la pollution plastique des grands fonds et « il faut s’appuyer sur les modèles de circulation océanique afin d’identifier la manière dont les déchets circulent ».

Je suis blasé car à chaque fois que l’on découvre l’ampleur des conséquences de notre humaine inconséquence, on se précipite pour mieux la comprendre. Là où il faudrait seulement agir.

La (relative) bonne nouvelle de cette revue matinale c’est le prix Goldman décerné à Claire Nouvian, fondatrice de Bloom, l’association qui alerte sur la surpêche en eau profonde. Reconnaissance environnementale pour son formidable combat mené contre les hypermarchés et la commission européenne.

Elle était l’invitée d’une émission radiophonique hier. Après avoir raconté avec émotion comment elle a survécu au Tsunami de 2004, à propos de son engagement, voici ce qu’elle déclare un moment :

Je suis désespérée, au sens il n’y a aucun espoir. On a pas le droit de le dire, surtout dans les médias. C’est pas la question de l’espoir, aujourd’hui c’est la question de l’action. Faisons tout ce qu’on peut, tout ce qui est à notre portée et on fera le bilan plus tard.

Cette phrase est dans la pure veine de la philosophie de Gunther Anders, que j’avais découvert il y a 10 ans grâce à la formidable maison d’édition « Encyclopédie des Nuisances« . Le sujet du catastrophisme éclairé, sur le fond, n’a pas beaucoup changé depuis Hiroshima. Seules la menace et l’imminence de la catastophe. A moins que nous ne soyons déjà dedans…

Sur la polémique Vegan

Depuis quelques mois l’actualité s’enflamme pour dénoncer l’activisime vegan. Ce terme jouit d’un éclairage médiatique, certainement grâce aux succès d’une part de l’association L214 et de l’engagement sincère de l’animateur et écrivain Aymeric Caron. Mais quiconque s’intéresse un peu au mouvement dit vegan sait que cette actuelle polémique date du siècle dernier. Et je me souviens de mes premières lectures anti-spécistes en 2003…

Je n’aime pas trop prendre ce ton blasé qui paraît forcément un peu condescendant. Car au contraire, je rafole du débat ! Mais pourvu qu’il puisse se réinventer.

Ce que je trouve positif et nouveau malgré tout, c’est le succès, grâce à la communication, de L214 et Bloom par exemple. L214, nous relayions déjà en 2011 (l’asso existe depuis 2008). Les caméras cachées dans les abattoirs ont fait mouche.

Pour Bloom, ce qui a fait mouche, c’est leur formidable B.D. pédagogique que nous avions relayée dès réception !

Pour les plus curieux, il existait un important mouvement « végétalien » dans la France de 1920 associée à un courant anarchiste (Rirette Maitrejean, Louis Rimbault…) qui avait plus ou moins tout dit à propos du débat vegan/anti-vegan (aujourd’hui allégorisé par Aymeric Caron/ Jocelyne Porhcer).

Ce n’est pas la première fois qu’au hasard d’une lecture, je réalise à quel point notre monde moderne a oublié que les dernières décennies avaient déjà très bien analysé les enjeux autour de l’Homme et de la Planète.

Internet et les applis webs

C’est aussi au hasard d’une lecture (fortuitement un autre anarchiste, l’anthroplogue David Graeber, dans Bureaucratie) que je suis tombé sur cette phrase page 162:

La plupart des gens qui travaillent dans des entreprises ou à l’univeristé ont été témoins d’une scène comme celle-ci. Un certain nombre d’ingénieurs sont assis dans une pièce, ils échangent des idées entre eux. Un nouveau concept, qui paraît prometteur émerge de leur discussion. Puis une personne qui pianote dans un coin, sur un ordinateur, après avoir effectué une rapide recherche sur Google, annonce que cette idée « neuve » est en fait ancienne; on a déjà essayé de la mettre en oeuvre.

Elle a soit échoué, soit réussi.

Si elle a échoué, aucun manager n’accepetera de dépenser de l’argent pour tenter de la ressuciter. Si elle a réussi c’est qu’elle a été brevetée, et on supppose qu’entrer sur ce marché est un objectif hors d’atteinte, puisque les premiers à y avoir pensé auront l’avantage du premier entré.

Le nombre d’idées à première vue séduisantes qui ont été étouffées dans l’oeuf de cette façon doit se compter par millions.

Et effectivement je pense avoir vécu ou provoqué ce genre de scène une dizaine de fois. Dédicace aux start-up de l’économie collaborative ! Mais bizarrement, comme pour le catastrophisme éclairé, cette course en avant technogique ne mène pas forcément à la paralysie, au contraire !

J’ai par exemple souvent ce genre d’échange sur toutes les applications censées nous aider à décrypter l’éco-consommation. Nous sommes nombreux à nous dire qu’une application web proposant une analyse en direct des articles à consommer (droits sociaux, impact environnemental, etc…) serait utile pour nous guider.

Peut-être. Mais, soyons fou, imaginons une appli qui reconnaît le poisson sur l’étal et vous dit en direct « attention, ce poisson fait l’objet d’une surpêche » ou « ce poisson encourage la pratique de la pêche électrique » ou « celui-ci favorise le raclage des fonds » etc etc… cela finirait par êttre absurde.

De la même manière que nous n’avons pas besoin d’un énième rapport pour identifier la manière dont les déchets circulent sur le plancher océanique, nous n’avons pas le temps de nous permettre d’affiner les algorithmes d’intelligence articielle et tutti quanti pour mieux évaluer le désatre en cours.

Je sais tout le côté paradoxal de ce propos, surtout pour un « guide d’achat éthique ». Effectivement, un moment donné, il faut bien savoir pour agir. Mais comme disait Sven Lindqvist dans « Exterminez toutes ces brutes » :

« Vous en savez déjà suffisamment. Moi aussi.

Ce ne sont pas les informations qui nous font défaut. Ce qui manque, c’est le courage de comprendre ce que nous savons et d’en tirer les conséquences ».

Un autre monde est possible. Et il est ici…

Le poète Paul Eluard aurait écrit quelque part « Il y a un autre monde… mais il est dans ce monde« . A moins que ce ne soit William Butler Yeats.

Quoiqu’il en soit j’ai toujours aimé cette formulation qui résout le dilemme de l’utopiste. Terme-quolibet qui est de mise quand on se trouve face à un résigné … qui lui-même se qualifiera de réaliste !

Techno-Sapiens ou Eco-Sapiens

Parmi une foultitude de remarques audacieuses dans Homo Deus de Yuval Noah Harari il y a celle-ci à propos des prédictions qui ne se réalisent pas. Non pas car elles sont délirantes mais au contraire très probables et plutôt effrayantes. Et permet conséquemment de s’en écarter*.

Là encore, on voit bien que la frontière entre l’idéaliste et le réaliste n’est qu’une convention. Cela marche également pour le passé. Tant de vestiges archéologiques tout bonnement inconcevables et qu’il nous faut pourtant bien constater. Là sous nos yeux incrédules des blocs monumentaux, des tracés vertigineux, des objets anachroniques…)

Et voilà que je reviens des universités négaWatt. A la différence du club de Rome qui publia son fameux rapport en 1976, l’association négaWatt propose un chemin vers le futur. Un futur désirable (bien plus que celui d’Harari…) soucieux de concilier impératif écologique (CO2, fossiles, fissiles…) et confort humain. Une sobriété est inévitable (se déplacer un peu moins, manger moins de viande, sus au gaspillage…). Et le reste est une question d’optimisation technique et sociétale.

J’y ai découvert concrètement ce qu’était un économe de flux. A savoir un bonhomme chargé au sein d’une collectivité (mais ca pourrait marcher pour une entreprise, un hopital…) de réduire la conso et de faire baisser la facture. Des baisses de 8 à 15% sont immédiatement trouvables. A Montpellier, c’est 2 millions d’euros économisés chaque année… Juste en surveillant les gaspillages d’eau, d’électricité, de carburant etc.

Ca laisse rêveur… Mais c’est la réalité.

Direction la Drôme.
Dans le village voisin de Dieulefit (ça ne s’invente pas !) on va fêter le premier anniversaire du LowCal, un ouvrage conçu par Enertech qui est un peu la référence en bâtiment performant. Le résultat est au-delà des attentes.

Sans chauffage, sans climatisation, construit en paille et ossature bois, il bat tous les records. 35 postes de travail pour 620 m2 utile et une conso électrique de 5,9 kWh/m2 sur l’année. Pourtant l’hiver fut rude et la moitié de cette consommation dérisoire est due à un appoint de chauffage électrique… qui est pourtant la bête noire de tout physicien !

La toiture photovoltaïque de 153 m2 a produit 9 fois plus que cette consommation. Et le tout à un prix abordable avec une faible énergie grise (matériaux naturels et locaux). Bref, un truc complètement délirant… qu’il suffit de visiter à quelques heures de Lyon…

Autant dire que lorsque l’on revient des universités negaWatt on a un peu les yeux qui brillent. On retrouve les contrariétés du quotidien assez vite.

Par exemple toujours cette lecture en cours de Homo Deus qui fait mal tant il force à poser les bonnes questions sur ce que veut l’homme. L’immortalité ? Le bonheur sans conditions ? L’omnipotence ?

Les trois.

Et hélas, il y a fort à parier que cet avenir teinté de robots, de cyborgs et d’artefacts rendra toute cette beauté sus-mentionnée dérisoire.

Et il y a aussi cette contrariété tellement banale. Ouvrir la porte de son bureau le lundi matin au retour. Surprendre son collègue avec un mini-chauffage bruyant, olfactif et énergivore. Lui faire remarquer qu’en cette journée d’octobre, il fait près de 21°. Qu’on a pas connu cela, pas même en 1921, qui fut une longue sécheresse d’ailleurs à l’origine de la grande famine soviétique. Le changement climatique. Lentement mais sûrement.

Comme la grenouille dans l’eau qui subrepticement chauffe, chauffe, chauffe.
Et se faire nonchalamment rembarrer… « Je fais ce que je veux ! »

C’est un mauvais rêve ? Non c’est la réalité.

* « Les historiens n’étudient pas l’histoire pour la répéter mais pour s’en libérer. »

Il s’agit d’un passage assez amusant à propos des pelouses ! En résumé, ce culte de la pelouse domestique que l’on retrouve en Occident (mais désormais aussi dans les pays désertiques du Golfe…) remonte aux signes de prestige des rois et ducs de France. Une fois que l’on connaît l’histoire des pelouses, on est aussitôt pris d’envie de basarder sa tondeuse et de tout laisser pousser !

Moi Président, j’inverserai la courbe des dommages

« Ecrire, c’était mettre de l’ordre dans ses idées. » ai-je lu récemment sur un réseau social où régnait pourtant le chaos. Comme j’aimerais que ce genre de miracle se produise, par la simple puissance du Verbe. Mais rien n’est moins sûr. Car parmi mes idées en suspension, j’ai en ce moment des étymologies indo-européennes, des angoisses électorales, des archéologues de la quantification du monde et une correspondance épistolaire avec le dernier grand pingouin. Ardu !

Continue reading « Moi Président, j’inverserai la courbe des dommages »

On peut se tromper

dickCroyez pas que je fais une obsession, mais j’aimerais encore parler d’Idriss Aberkane. C’est un peu le dernier volet de la trilogie.

Je viens de lire le livre « Libérez votre cerveau« . Pour être honnête, je me suis arrêté aux trois quarts. Trop décousu. Au début c’était amusant les considérations existentielles mêlant René Guenon (!), Pierre Rabhi et Steve Jobs. Mais ça a fini par me gonfler un peu les invitations à « vivre sa vie« , à « faire ce que l’on aime ».

C’est même pas de la jalousie ou de la frustration car j’ai justement cette chance de faire ce que j’aime. Mais j’achetais le livre pour me renseigner sur les neurosciences, pas pour un tel épanchement de conseils sympathiques mais un peu tartignoles. Je suis sans doute sévère, car c’est à la fois profond et niais.

Au fond ce qui me dérange, c’est le recours glissé du propos magique « Quand on veut, on peut« . Aux oubliettes la reproduction sociale et les mécanismes sociologiques.

Libérez votre cerveau

On y retrouve les punchlines dans les deux vidéos (mentionnées ici et ) qui font la saveur de ce vulgarisateur à propos du biomimétisme, de l’économie de la connaissance et des neurosciences. Mais on part sur des expériences de mentalisme (saturer la mémoire géographique de votre interlocuteur pour essayer de le payer avec des billets blancs). Et des astuces vieilles comme le monde pour développer sa mémoire (méthode des loci par exemple). Et des considérations sur la pédagogie défaillante, la faible considération pour les touche-à-tout et les vulgarisateurs… etc.

De mon point de vue un sacré foutoir. Et je repense aux propos dans les vidéos. Finalement, c’était assez banal aussi. Par exemple le fait qu’on apprend mieux en jouant. Que la Nature est quand même impressionnante etc.

Et voilà qu’un ami me dévoile des bizarreries :

Idrisse Aberkane
– se présente comme professeur à Polytechnique, ce qu’a démenti officiellement l’institution. En fait il a été doctorant à Paris-Saclay, dans un laboratoire basé sur le campus de Polytechnique.

– se présente comme affilié au CNRS, ce que dément une recherche dans l’annuaire du CNRS qui pourtant comprend même les personnels des universités qui font leur recherche dans un labo où le CNRS a des billes.

– se présente comme enseignant-chercheur à Centrale Supélec alors que cette institution aussi l’a démenti officiellement. Il est en fait enseignant au MS Stratégie et développement d’affaires internationales de EM Lyon, co-accrédité par Centrale-Supelec https://t.co/ArJEXdPDBd

– se présente comme chercheur affilié à Stanford alors qu’il est « affiliate scholar » du Kozmetsky Global Collaboratory, qui est lui même une organisation philanthropique affiliée à Stanford. Au final il n’est pas dans l’annuaire de Stanford https://t.co/G5A2UvK9GF

– se présente comme « interne à l’université de Cambridge », c’est à dire qu’il a été stagiaire (« intern » en anglais) là bas un été.

– se présente comme émissaire de l’UNESCO. Pas de réaction officielle de l’institution, mais son site ne mentionne jamais son nom.

– se présente comme Normalien, ce qui veut dire avoir réussi le concours d’entrée à l’école Normale Supérieure (concours d’entrée dans la fonction publique) et y avoir suivi ses études comme fonctionnaire stagiaire. Il y a bien suivi des études, mais en tant qu’auditeur admis sur dossier. Je connais des auditeurs des ENS très biens, c’est le plus petit abus de langage de la liste.

– dit avoir fait le « Cogmaster », le Master Recherche en Sciences Cognitives co-habilité entre autre par l’ENS de la rue d’Ulm. Il n’est pas recensé dans la liste des anciens élèves. http://sapience.dec.ens.fr/cogmaster/www/f_01_archives.php

– se présente comme comme ayant 3 « PhD » dans des domaines très différents soutenus à un an d’intervalle. En anglais PhD veut dire doctorat et correspond à une thèse d’au moins 3 ans, mais le terme n’est pas légalement protégé en France. Le premier « PhD » a été obtenu auprès d’une institution https://t.co/GgX5MI3otr non agrémentée par l’état. Elle demande des droits d’inscription très élevés (8 650 € par an pour s’inscrire puis 600€ de « droit de soutenance »). Je n’ai pas dit que ce diplôme bidon a été « acheté », mais bon, on sait tous ce que valent les écoles qui ont des pubs dans le métro.

– le second doctorat soutenu le 16-06-2014 en littérature comparée avec comme président du jury un prof d’informatique : http://theses.fr/2014STRAC005 En tant que physicien j’ai du mal à juger de la pertinence de la thèse, mais l’informaticien a dû avoir du mal aussi. Pourtant il a dû apprécier puisque lui comme plusieurs autres membres de ce jury se sont retrouvé dans le jury de son 3ème doctorat.

– Il n’a qu’une seule publication recensée et il s’agit d’un résumé pour une conférence quand il avait 21 ans et qui n’a pas donné lieu à un article ensuite.

Aurait-on à faire à un escroc ?

La réponse n’est pas évidente. Ce qui est sûr, c’est qu’il a tendance à storyteller son parcours, ce qui est assez bizarre quand on le lit et l’écoute à propos de la vacuité des titres universitaires…

Voilà donc réactivée la vieille guerre entre chercheurs et universitaires du sérail versus trublions vulgarisateurs à succès. Voyez Lorànt Deutsch et les frères Bogdanov. Polémiques stériles puisque sur gonflées par les medias. Mais qui a au moins le mérite de nous rappeler que la science est une chose humaine… tellement humaine.

J’ai aussi pu parcourir quelques critiques argumentées , sur medium et sur textup (Merci Etienne de me les avoir indiquées). Si vous avez un peu de temps, lisez-les pour vous faire votre propre avis. Ils mettent des mots sur ce que j’ai ressenti la première fois : quel est le sens de tout cela ?

jambon-peche-cote-ivoire-miniN’est-on pas encore victime d’une promesse fallacieuse ? A savoir la possibilité de concilier écologie sincère et économie capitaliste ? Réconcilier notre hybris/démesure avec l’équilibre naturel.

La croissance verte ?

Dans le précédent billet j’avouais justement mes plaisirs à déguster du savoir grâce à des vulgarisateurs de talent. Je reste fan des vidéos de MicMaths (d’ailleurs cité comme ami dans le livre) et de DirtyBiology qui peut être me convainquent plus car ne proposent pas de miroirs aux alouettes. Peut-être que vulgarisation et futurologie ne font pas bon ménage. Car dans toute futurologie, il y a (inconsciemment) beaucoup d’idéologie.

J’espère que l’intéressé lira ces critiques et aura la sagesse d’y répondre.

L’arbre à vent

ventDans le même registre, il y a eu cet article du Canard Enchaîné à propos d’un gadget techno-verdâtre nommé Arbre à Vent. Un projet que j’avais découvert à l’époque où je négociais avec la plateforme WiSeed. Déjà, je ne comprenais pas trop pourquoi certains s’emballaient pour cette start-up dont le seul mérite était d’avoir pensé une éolienne en forme d’arbre ?

C’est joli et ca fait plaisir à la section Communication d’une poignée de pollueurs… mais c’est franchement pas pratique. J’avais regardé rapido les chiffres (rendement, puissance etc…) et m’étais empressé de ranger cela dans mon placard à archives , dossier que j’ai nommé sur mon ordinateur « CaCraint« .

Il y a eu un article du Figaro qui avait détaillé le calcul. Je les remets si besoin :

Un Arbre à Vent coûte 30 000 €, produirait 8MWh/an (au max) et rapporterait alors 1 000 €/an. Bref, amorti au bout de 30 ans si pas de frais de maintenance…

Et c’est pas eco-conçu.

Pour comparer, une éolienne est actuellement en financement citoyen du côté de Redon, à Avessac. Elle produit 4400 MWh/an soit 500 fois plus d’électricité à coût équivalent. C’est sur Energie Partagée. C’est ce que l’on appelle la révolution éolienne silencieuse…

Que l’on m’explique ! Oui je devine les raisons. Un Arbre à Vent c’est Nouveau et c’est Mignon.

Après s’être fait étrillé par les experts rationnels et les revues sérieuses (car oui la transition énergétique c’est hélas sérieux car vital…), voilà qu’une pleine page du Canard Enchaîné plombe notre Arbre à Vent sur des histoires de sécurité. Las, la start-up a fourni un communiqué de presse avec droit de réponse et a assuré porter plainte pour diffamation. Ambiance…

Peu me chaut de savoir si ces les petites feuilles de l’Arbre à Vent sont sécurisées, je conçois qu’une start-up puisse humblement améliorer son prototype et j’ai toute mon admiration pour l’attitude entrepreneuriale. Dommage d’avoir entre-pris cette voie…

Au passage, l’aveu énergétique figure d’ailleurs dans le communiqué :

100W par aeroleaf multipliée par le nombre de feuilles, c’est une très belle performance qui ne peut naturellement se comparer à celle d’éolienne de 100 m de haut.

Le problème étant que l’on est tenté de comparer…

Conclusion

Y a-t-il un lien entre la mésaventure Arbre à vent et la mésaventure Idriss Aberkane.

C’est beau sur le papier, c’est pétri de bons sentiments… mais j’ai comme l’impression qu’on nous a un peu pris pour des gogos !

couteaux

A quoi servent les guides de haut brouillard ?

hamsterFaut-il être optimiste ? Faut-il être pessimiste ? Le vieux Hegel se régalerait à dire que nous pouvons recourir au Aufhebug : dépasser le pessimisme, bien légitime compte tenu de la situation sociale et écologique, par un optimisme de principe afin de passer à l’action et s’ancrer ainsi dans le réalisme.

Autre formulation : « Là où croit le péril croît aussi ce qui sauve ». (Hölderlin)

Ou encore : « Ce n’est pas parce que les utopies échouent qu’il ne faut pas les approcher ».

La dernière ?
On annonce dans les journaux que la moitié des espèces sauvages a disparu en 40 ans !

Oui il est temps de tenter le « journalisme positif » (ce que fait le journal Kaizen, et ce qui a intéressé cette semaine l’émission arretsurimages).

Nous revient cet excellent souvenir d’un journaliste, Gaël Legras, qui était venu nous filmer à Marseille pour Canal Plus. Dans un TedX plutôt émouvant, il explique pourquoi les médias, et notamment la télévision, ne mettent jamais en avant ce qu’il peut y avoir de beau dans l’humain…

Rien à voir mais nous avons reçu la dernière publication de l’ADEME concernant les labels de l’éco-consommation.

zen-footPour nous, l’ADEME, c’est un peu l’institution nationale qui doit être impartiale et claire, à force d’études et d’expertise. Il se trouve que cette Agence nationale, connue pour son assise sur les questions énergétiques, possède aussi un pôle éco-consommation. Côté coulisses, comme l’éco-consommation c’est un peu notre dada, nous avons plusieurs fois tenté d’aborder l’ADEME pour des partenariats, et notamment sur cette question des labels.

Car, si nous pouvons nous enorgueillir d’une chose, c’est bien du succès de notre guide « Les bons labels et les truands« .

Distribué sur de nombreux salons, réclamé sur par de nombreuses associations, vu et téléchargé des dizaines de milliers de fois, il nous arrive de le rencontrer au hasard, chez des gens, dans des bureaux, dans des salles d’attente !

baiserMême si le titre est un fort habile jeu de mot (merci à Charly des pouletsbicyclettes), le succès est à trouver ailleurs. C’est un guide qui « prend position », qui donne une direction, un endroit où aller. Pour revenir à Hegel, c’est un objet réaliste !

Nous avons régulièrement épluché les guides labels de l’ADEME, environ un par an. Et il faut bien avouer que ce genre de publication ne peut pas trouver de public.

Ils ont classé les labels non pas par pertinence mais par « catégorie de produits ». Vous apprendrez donc cette chose très importante à savoir que le label AB se retrouve plutôt dans l’alimentation, et que sur les jouets, vous ne verrez que Nordic Swan… ce qui est faux d’ailleurs puisque de nombreux autres labels se retrouvent dans cette catégorie Jouets.

Chaque fois, nous espérons que l’ADEME nous lise un peu pour se corriger. Par exemple, nous écrivions à propos du label plus que bof, « Rainforest Alliance » ainsi décrit par le guide de l’ADEME :

rainQue veut dire ce logo ?
– commerce durable* (milieu tropical et subtropical),
– interdiction d’utiliser des pesticides non autorisés,
– évitement maximal des cultures transgéniques (introduction, culture ou transformation),
– pratique de la chasse, de la capture ou du trafic d’animaux sauvages interdites…
* Le commerce durable ne garantit pas de prix minimum pour les produits mais inclut le salaire minimum national.

Honnêtement, si vous n’êtes pas spécialiste du sujet, il y a de fortes chances pour que vous vous fassiez avoir. Mais avec un peu d’habitude, on réalise bien que ce label est une fumisterie. Interdit est un synonyme de non autorisés, l’évitement maximal n’est qu’une formule élégante pour dire « on fait comme on peut, comme on veut » et on ne voit pas pourquoi la récolte de café entrainerait du trafic d’animaux sauvages… Et évidemment, le « commerce durable » qui respecte la loi en recourant au salaire minimum national.

En résumé, si on veut aider le consommateur à s’y retrouver, un guide doit dire « Ce label ne garantit rien ».

Et aussi, ce qui est agaçant, c’est que l’ADEME est à l’origine d’un label qui s’appelle ecolabel européen, qui est une heureuse initiative d’harmonisation européenne mais qui a toujours été un point de désaccord entre eux et nous (car oui nous avons déjà fait des tables rondes avec l’ADEME sur ce sujet).

La nature de ce label est de s’adapter à chaque secteur et inévitablement, en fonction des domaines d’application, le label peut apporter une vraie garantie (peintures notamment) mais est parfois bien léger par rapport aux labels spécialisés (par exemple la cosmétique face à Cosmebio, la papeterie… même le WWF le dit).

 

Autre nouveau venu dans ce guide, c’est le label « Issus d’une exploitation de Haute Valeur Environnementale« . Le néophyte se dit chouette; l’expert renifle à plein nez le label de bric et de broc. Une référence à « Haute Qualité Environnementale » qui est déjà un label très bof dans le secteur du bâtiment. Le terme « Exploitation » au lieu de « Ferme » qui rappelle le vocabulaire des gros syndicats agricoles.

lesbonslabelsEt une rapide recherche nous confirme que c’est bien une mention issue du Grenelle de l’Environnement où l’on a tenté de ranimer le bon vieux concept d’agriculture raisonnée qui n’existait que pour contrer le dynamisme du label Agriculture Biologique. Contrairement à ce qu’indique la brochure de l’ADEME, nous défions quiconque de me trouver ce label dans un magasin de produit biologique, voire dans un magasin tout court !

A notre humble avis, le rôle d’une agence nationale en matière d’éco-consommation est bel et bien d’orienter les acheteurs que nous sommes vers les produits mieux-disant socialement et environnementalement. En mentionnant des labels n’offrant aucune garantie sérieuse, on ne fait que du recensement, mais pas du conseil.

Loin de nous l’idée de considérer que nos publications détiennent La Vérité. Nous avons toujours revendiqué une part de subjectivité, mais nous sommes toujours capables d’expliciter un positionnement. Par exemple, suite à la récente polémique à propos de Max Havelaar, nous nous sommes interrogés sur la nécessité de réévaluer notre note. Nous avons aussi longtemps penser à référencer tous les labels bidons et nous avons parfois fait une fiche (Sustainable cleaning, conso responsable Leclerc ) mais cela vaut-il vraiment le coup. Il existe tellement d’initiatives farfelues que nous le faisons uniquement quand le logo se répand effectivement.

Mais peut-être qu’un jour, ils auront tous droit à leur affiche. Et là nous pourrons dire : « voici tous les labels que vous pouvez fuir« .

Et avec un peu de chance, ce sera diffusé par l’ADEME ?
Il y a juste un petit Aufhebung pour y parvenir !

Un copain en visite au siège social de Qechua nous a envoyé ce clché !
Un copain en visite au siège social de Quechua (marque Décathlon) nous a envoyé ce cliché !